lundi 19 janvier 2009

Au combat d’Épernon le 4 octobre 1870



On connaît les victimes de la Guerre de 14-18 (voyez l’article sur Wikipedia) des mutilations du visage appelées vulgairement les "Gueules cassées" mais que sait-on de celle de 1870-1871?
….
« Tréon, le 25 février 1906

À Monsieur le Grand chancelier de la Légion d’honneur

Je soussigné Douin Pierre François Edmond, né le 23 août 1848 à Luplanté (Eure-et-Loir) domicilié à Tréon, canton de Dreux, ai l’honneur de solliciter de la Grande Chancellerie, la décoration de Chevalier de la Légion d’honneur.

Je crois devoir vous exposer que j’ai été très grièvement blessé au combat d’Épernon le 4 octobre 1870;

1° d’une balle à l’épaule droite,
2° d’un éclat d’obus qui me fracassa tout le côté droit de la face me brisant la mâchoire, le nez et me crevant l’œil droit,
3° d’un autre éclat d’obus à la hanche droite (cet éclat n’ayant atteint que les chairs de la cuisse droite ne m’a pas été compté comme blessure).

C’est en combattant à l’arrière-garde pour protéger la retraite de nos soldats que je fus atteint.

Malgré mes blessures, je m’évadais de Chartres, je rejoignis mon bataillon au Mans, c’était le 4e bataillon de la Garde mobile d’Eure-et-Loir, je continuai la campagne et j’eus deux citations à l’ordre du jour.

Je dois ajouter aussi que sur cinq cousins germains de ma famille qui firent la campagne de 1870-1871, trois sont morts des suites de leurs blessures et de maladies contractées pendant la guerre.

Je fus décoré de la médaille militaire par décret du 10 octobre 1871 (enregistré n° 14699) et j’obtins une pension viagère pour infirmités résultant de la campagne de 1870-1871.

J’ose espérer Monsieur le Grand chancelier que vous prendrez en sérieuse considération ma demande de la croix de chevalier de la Légion d’honneur.
Veuillez agréer, etc.

Signé : E. Douin »

Il s’agit du dossier en LH/3212 (Douin Pierre-François-Edmond, soldat du 4e bataillon, 2e compagnie de la Garde mobile militaire d’Eure-et-Loir) de 33 pièces de 1903 à 1914 (pièces justificatives, correspondance, recommandations diverses dont celles de Maurice-Gabriel Viollette, député d’Eure-et-Loir, nombreuses relances, deux photographies sans date, atelier C. Blin à Chartres, etc.).

Pour la petite histoire, notre Pierre François Edmond Douin n’obtiendra jamais sa croix, et jusqu’au bout, on lui demandera des renseignements fictifs tantôt sur son état civil tantôt sur ses services (pourtant son dossier regorge de ces pièces), mais il est vrai que lorsque la Grande Chancellerie décide de ne pas accorder la médaille, et c’est généralement le cas pour les femmes (des cantinières pour la plupart), alors rien n’y fait, c’est un «non» jusqu’au bout…jusqu’au décès naturel du demandeur…

2 commentaires:

Anonyme a dit…

vraiment terrible,
ce sont ces drames humains personnels - trop souvent oubliés ou jamais mentionnés au profit d'une histoire générale - qui nous révèlent toute l'horreur de la guerre ; c'est d'ailleurs cette narration au niveau personnel de la guerre que j'ai adorée dans "la guerre d'Alan" de Guibert.

Anonyme a dit…

étonnante histoire que ce natif de luplanté à vécu, mais avec le temps rien n'a vraiment changé ,la reconnaissance est réservé aux gens pistonnés ou bien placés.Un habitant de Luplanté