Une histoire de la Légion d'honneur ne serait pas complète sans l'étude des lettres de demandes qui pourraient être traitées dans une optique sociologique (et même juridique je pense). Les critères d'attribution de la Légion d'honneur ne sont en effet définis que dans ses caractères généraux et il serait très pertinent de travailler sur la fascination de ce banal ruban rouge et de sa perception dans l'imaginaire de nos contemporains mais aussi des militaires de l'Empire dont les dossiers forment un groupe documentaire de 80 cartons environ (LH/3185 à 3267) que je traite en ce moment.
Voici une candidature retirée cinq après son dépôt à la Grande Chancellerie par Nicolas Bourguignon, né le 13 août 1827 à Vernot (Côte-d'Or), ancien sous-officier d'infanterie puis chef de gare à Notre-Dame-de-Commiers (Isère) après une dizaine d'années de service dans l'armée, fort de 8 campagnes militaires qui lui ont occasionné 2 blessures (il a été libéré en 1857). Il fut décoré de la médaille militaire et celle de Crimée, son dossier est en LH/3197.
Il adresse sa première demande le 29 mars 1889 dans laquelle il joint "un souvenir" du 14 novembre 1870 (un "souvenir" est un récit d'un fait marquant de la guerre vécu par un soldat qui le relate dans les moindres détails, certains sont parfois imprimés comme celui trouvé dans le dossier de Léon Caïn en LH/3200, "Souvenirs du siège de Strasbourg, 1870. Le combat du pont d'Illkirch" par Léon Caïn, imp., 1902, 40 pages).
Le "souvenir" que relate notre Nicolas Bourguignon s'est déroulé dans la gare de Saint-Vit (Doubs) qui "porte encore la trace des balles tirées [par les Prussiens]"…
De nombreuses demandes se succèderont à la Grande Chancellerie jusqu'à cette ultime lettre du 20 mai 1894 où Nicolas Bourguignon, excédé de l'attente, après avoir rappelé les dates de ses dernières demandes (3 au total) et jugeant que "personne ne s'intéressant plus à [lui] et n'ayant plus d'espoir d'obtenir la Légion d'honneur, a pris la décision de retirer les pièces afin qu'il n'en soit plus question".
Sa demande avait pourtant été appuyée par Georges Vian, député de la Seine-et-Oise, mais celui-ci ne fut pas réélu en 1893 et semble avoir été impliqué dans l'affaire de Panama, ce qui justifie sans doute le retrait de la candidature de Nicolas Bourguignon…
Une simple note sur le dossier indique "renonce, voir lettre du 20 mai 1894". Le 22 mai on lui renvoiera la copie du rapport du maire de Saint-Vit, sa carte militaire, l'état de ses services, la copie de son congé militaire ainsi que les lettres de recommandation du député Georges Vian…
Un dossier en moins donc à traiter pour le personnel de la Grande Chancellerie…
Dans le même genre, Auguste Marie Chaboseau né le 13 avril 1835 au Pont-de-Planches (Haute-Saône), officier d'administration à Clamart (Hauts-de-Seine), retire le 15 juillet 1889 sa demande déposée en 1886 (LH/3202) “(…) aujourd’hui et en présence de certaines personnalités que, depuis trois ans, je vois figurer dans les listes des décorés, j’ai l’honneur de vous prier d’avoir la bonté de supprimer ma demande précitée ainsi que les copies qui y sont jointes, car actuellement et dans le cas peu probable où il plairait au Conseil de l’ordre de faire droit à ma demande, je me trouverais déshonoré de porter sur ma poitrine une même croix portée par des personnes indignes de cet honneur [voilà qui est bien balancé!]. Je suis, etc. votre très dévoué subordonné, etc.”.
C’est bien dommage car son dossier était aussi sur le point d’aboutir et les renseignements sur son compte, recueillis à la fois au préfet et à son administration de tutelle par la Grande Chancellerie, étaient très favorables, mais une attente de 3 ans était un peu trop pour notre Chaboseau…
Il adresse sa première demande le 29 mars 1889 dans laquelle il joint "un souvenir" du 14 novembre 1870 (un "souvenir" est un récit d'un fait marquant de la guerre vécu par un soldat qui le relate dans les moindres détails, certains sont parfois imprimés comme celui trouvé dans le dossier de Léon Caïn en LH/3200, "Souvenirs du siège de Strasbourg, 1870. Le combat du pont d'Illkirch" par Léon Caïn, imp., 1902, 40 pages).
Le "souvenir" que relate notre Nicolas Bourguignon s'est déroulé dans la gare de Saint-Vit (Doubs) qui "porte encore la trace des balles tirées [par les Prussiens]"…
De nombreuses demandes se succèderont à la Grande Chancellerie jusqu'à cette ultime lettre du 20 mai 1894 où Nicolas Bourguignon, excédé de l'attente, après avoir rappelé les dates de ses dernières demandes (3 au total) et jugeant que "personne ne s'intéressant plus à [lui] et n'ayant plus d'espoir d'obtenir la Légion d'honneur, a pris la décision de retirer les pièces afin qu'il n'en soit plus question".
Sa demande avait pourtant été appuyée par Georges Vian, député de la Seine-et-Oise, mais celui-ci ne fut pas réélu en 1893 et semble avoir été impliqué dans l'affaire de Panama, ce qui justifie sans doute le retrait de la candidature de Nicolas Bourguignon…
Une simple note sur le dossier indique "renonce, voir lettre du 20 mai 1894". Le 22 mai on lui renvoiera la copie du rapport du maire de Saint-Vit, sa carte militaire, l'état de ses services, la copie de son congé militaire ainsi que les lettres de recommandation du député Georges Vian…
Un dossier en moins donc à traiter pour le personnel de la Grande Chancellerie…
Dans le même genre, Auguste Marie Chaboseau né le 13 avril 1835 au Pont-de-Planches (Haute-Saône), officier d'administration à Clamart (Hauts-de-Seine), retire le 15 juillet 1889 sa demande déposée en 1886 (LH/3202) “(…) aujourd’hui et en présence de certaines personnalités que, depuis trois ans, je vois figurer dans les listes des décorés, j’ai l’honneur de vous prier d’avoir la bonté de supprimer ma demande précitée ainsi que les copies qui y sont jointes, car actuellement et dans le cas peu probable où il plairait au Conseil de l’ordre de faire droit à ma demande, je me trouverais déshonoré de porter sur ma poitrine une même croix portée par des personnes indignes de cet honneur [voilà qui est bien balancé!]. Je suis, etc. votre très dévoué subordonné, etc.”.
C’est bien dommage car son dossier était aussi sur le point d’aboutir et les renseignements sur son compte, recueillis à la fois au préfet et à son administration de tutelle par la Grande Chancellerie, étaient très favorables, mais une attente de 3 ans était un peu trop pour notre Chaboseau…
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