jeudi 14 juin 2012

Le système de numérotation des dossiers de la série BB


Page d'un décret de naturalisation de la sous-série BB/34 qui donne
le numéro d'un dossier en  BB/11 (dossier 3836X85)


Je ne reviens pas sur la richesse de la série BB (de la section du XIXe siècle) des Archives nationales. Tous les dix-neuvièmistes et les historiens de la troisième République puisent dans ces dossiers toutes sortes d’informations sur leurs recherches (les grandes affaires politiques, la surveillance ou la répression des manifestations hostiles au gouvernement par les écrits, actes, propos et cris séditieux, délits de presse et de librairie, etc.). Ils permettent en effet d'étudier l'esprit public au XIXe siècle et aussi l'histoire de la presse. Pour avoir bien fréquent la sous-série BB/18, celle ci n'est pas seulement intéressante pour l'histoire politique et l'histoire de l'esprit public mais elle contient aussi des documents de premier ordre sur les questions sociales (grèves et coalitions ouvrières, désordres causés par l'emploi des machines, travail des femmes et des enfants, taux des salaires, durée de la journée de travail, etc.), les questions économiques (crises des subsistances de 1816-1818, 1829-1830, 1839-1840, 1846-1847), les questions religieuses (anticléricalisme, conflits entre catholiques et protestants, opposition du clergé an gouvernement, etc.), l'enseignement libre (fermetures d'écoles ouvertes sans autorisation), la traite des noirs, le brigandage (bandes de malfaiteurs, attaques de diligences), les sociétés secrètes et les mouvements de pensée politique (Fouriéristes, Saint-Simoniens, francs-maçons, société des droits de l'homme, etc.).

Je m’étais amusé, lorsque j’étais «responsable par intérim» de cette série (c’était au départ à la retraite de madame Ségolène Barbiche), à faire une liste du système de cotation des documents de cette série. En effet, la connaissance de ce système de cotation reste indispensable pour certaines catégories de dossiers. Par exemple, on ne peut pas retrouver un dossier de naturalisation, concernant telle ou telle personne naturalisée depuis 1814, si l’on ignore la cote qui lui avait été donnée au ministère de la Justice.

Attention toutefois, le terme «dossier», qui signifie à la fois une unité intellectuelle et une unité matérielle, désigne ici le regroupement des pièces concernant la même affaire, cousues sous une étiquette par exemple (comme les dossiers relatifs aux affaires criminelles pendant la première moitié du XIXe siècle), ou insérées dans une chemise. À leur ouverture, chacun de ces dossiers recevait une cote, selon un système alphanumérique, différent selon les bureaux et les catégories de dossiers.
Je vous laisse ici le dépouillement de ce système qui pourra, je l’espère, rendre service aux chercheurs (par ailleurs j’avais déjà utilisé maintes fois ce tableau pour des formations internes ou externes pour des lecteurs ou des stagiaires).

Pour les dossiers de personnel on trouve les lettres A, M, H, K, N, AP, R, H, C, CP
Aux dossiers des tribunaux concernant les magistrats et les greffiers ainsi que ceux de la Cour de cassation et des cours d’appel, fut affectée la lettre A (ne pas confondre avec la lettre A des dossiers des affaires criminelles)
Personnel des tribunaux de première instance, lettre M
Personnel des justices de paix, lettre H

Lettre H (ici dossier d'un juge de paix 73H8 pour la Seine)


Personnel des tribunaux de commerce, lettre K
Les dossiers de notaires reçurent, lettre N
Dossiers des avoués, lettre R ou A ou AP (AP pour les avoués d’appel)
Dossiers des huissiers, lettre R ou H 
Dossiers des commissaires-priseurs, lettre R ou C ou CP


Lettre R pour commisseur-priseur


Outre ces lettres, la cote des dossiers de personnel comporte le numéro de la cour d’appel ou du département ou de la ville (pour les tribunaux de commerce) et, le cas échéant, un numéro d’arrondissement judiciaire ou de canton. Par exemple, 1 H 3 sera la cote affectée à un dossier de personnel de la justice de paix d’un tel canton (n° 3) du département de l’Ain (n° 1).

Mais il faut prendre garde que la numérotation des cours et des départements a été tributaire des modifications territoriales de la France : départements réunis sous la Révolution et l’Empire puis détachés en 1815, création du Tarn-et-Garonne en 1808, création du département de Corse en 1811 par la réunion du Golo et du Liamone, rattachement de la Savoie et de Nice en 1860, perte puis recouvrement de l’Alsace-Lorraine entre 1871 et 1918, conquêtes coloniales, notamment de l’Algérie où fut installé le système judiciaire français à partir de 1834. Dans ces conditions, la numérotation des départements a varié selon la pratique des bureaux qui géraient les différentes catégories de personnel. Par exemple, la Corse a été insérée entre la Corrèze et la Côte-d’Or, ou bien est resté classée à la place du Golo (n° 36). De même, le Tarn-et-Garonne a repris son ordre alphabétique ou bien est resté en queue de liste avec le n° 116 qu’il avait reçu en 1808. Ces remarques ne sont pas sans importance, car il en subsiste des traces dans les classements actuels des dossiers aux Archives nationales, notamment pour le personnel des justices de paix et les notaires.

Dossiers des affaires civiles
Les dossiers des affaires civiles reçurent la lettre B, ceux des absents civils les lettres AB ; à partir de 1832, la lettre X fut affectée aux dossiers du sceau.

Lettre B (ici B94 pour année 1894)


Dossiers des affaires criminelles

Lettre A (ici A4)
Les lettres ont connu beaucoup de variations depuis l’an IV. Jusqu’en 1822, le dossier nouvellement ouvert recevait une cote composée d’une lettre de série : C pour le correctionnel et D, DD, A, pour les matières criminelles , suivie du numéro d’ordre habituel (avec de nombreuses variations selon les bureaux).

Lettre A (ici A07 et plus précisément 92A1907) avec renvoi à d'autres dossiers :
"pièces jointes à S71 [comprenez  Dossier de grâce de l'année 1871]
 [et] CR07 [comprenez Commission Rogatoire de l'année 1907]" 
Depuis 1890, sont utilisées les lettres A et BL, tandis que les lettres Ex ou T (T, T2 à T5 puis TR à partir de 1980) concernent les dossiers d’extraditions et CR les commissions rogatoires.

Lettre S pour recours en grâce, ici celui de Daumier (le caricaturiste)

La lettre S fut attribuée aux dossiers de grâces à partir de 1811 (en l’an XI, les premiers dossiers portent un n° d’ordre suivi des lettres BG pour Bureau des Grâces) ; mais on peut trouver aussi GP, SM ou SV (et PM ou R ou REV à partir de 1940).

Lettre S pour les grâces, ici S06 pour l'année 1906

En règle générale, les numéros et les exposants qui accompagnent les lettres attribuées aux dossiers des affaires civiles, criminelles et de grâce, ainsi que du sceau, renvoient à un ordre chronologique et non géographique. Il en est de même pour les dossiers de pensions et de secours, auxquels avaient été données respectivement les lettres P et Z.

Voilà.

1 commentaire:

engelsk norsk oversetter a dit…

A lot of handwritten stuff from a long time ago, I am so impressed by this crap!