lundi 9 juin 2008

Un Belge enrubanné


Le port illégal de décorations était considéré nominativement par le Code pénal dans ses rapports avec l’autorité publique, et rangé parmi les attentats contre la paix publique. D’après l’article 259 du Code pénal (devenu aujourd’hui l’article 433-14 et qui incrimine toujours le fait de porter irrégulièrement une décoration réglementée par l’autorité publique), cette disposition, n’avait pas seulement pour objet de protéger le signe honorifique en lui-même, mais encore de faire obstacle à certaines escroqueries. Était ainsi condamnée toute personne qui aura publiquement porté une décoration qui ne lui appartient pas, à un emprisonnement de 6 mois à 2 ans, cet article était applicable aux Français et aux étrangers, mais il existe tout de même quelques failles.

Ainsi, Charles Heyman, homme de lettres belge, demeurant au 1 rue de Berlin à Paris (notez que cette rue n’existe plus à Paris depuis la dernière guerre, elle a été dénommée «rue de Liège», seul subsiste un minuscule square de Berlin perdu dans le 8e arrondissement…)…, ce Charles Heyman donc, avait été l’objet à la date du 7 février dernier d’un procès-verbal pour port illégal de décoration. Voici en quels termes le Procureur général de Paris en fait un rapport au Garde des sceaux, 23 avril 1900. (BB/18/2143, dossier 103 A 1900).

«(…), le 16 février, en effet, M. Heyman avait été aperçu sur la voie publique, portant à la boutonnière de son vêtement un ruban rouge semblable à celui de la Légion d’honneur. Il appert des explications (…) qu’il serait titulaire de plusieurs ordres français ou étrangers et notamment, ainsi d’ailleurs qu’il en a justifié par la représentation du diplôme, qu’il est chevalier de l’ordre du Christ de Portugal dont le ruban est rouge, en effet, comme celui de la Légion d’honneur (…) mais il a excipé de sa qualité de sujet belge et a soutenu que l’article 259 du Code pénal, le décret du 10 mars 1891 et les autres textes régissant la matière, ne sauraient s’appliquer à un sujet étranger et il s’est déclaré résolu à continuer à porter le ruban rouge de l’ordre du Christ de Portugal »…

(…) suivent ensuite des questions de principe et le Procureur général propose de classer l’affaire, ce que confirme le ministère dans une lettre du 7 mai 1900 conformément à un arrêt rendu par la cour de cassation le 25 mars 1899 dans une affaire identique.

Aujourd’hui, l'article 3 du décret du 6 novembre 1920 précise qu'il est interdit aux titulaires des décorations étrangères comportant des rubans rouge de les porter comme des rubans ou en rosette seuls sans les insignes qui s'y rattachent.

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