mercredi 3 janvier 2007

Dossiers de détenus politiques (1908-1932) dans BB/37


En juin 2002 des documents ont été retrouvés par hasard au rez-de-chaussée d’un magasin des Archives nationales. Les cotes provisoires DP 1 à 10 leur ont été alors attribuées et un bordereau de deux pages a été rapidement dressé. Ces papiers concernent essentiellement des dossiers de détenus politiques de 1908 à 1932 environ. En 2006, ils ont été conditionnées en 19 cartons et cotés définitivement BB/37/1 à 19 (ministère de la Justice). Elles n’ont d’autre lien que leur attachement au service producteur (l’Administration pénitentiaire a en effet été rattachée au ministère de la Justice en 1911).
Les détenus politiques ont depuis toujours bénéficié d’un régime spécial. Déjà, le décret du 11 novembre 1885, portant règlement du service et du régime des prisons pour courtes peines, avait indiqué, par son article 99, qu’un règlement spécial déterminerait les dispositions applicables à tous les individus condamnés pour faits politiques (réputés innocents jusqu’au jour de leur condamnation ; ils étaient, de fait, considérés comme simples prévenus et tiraient avantage de toutes les dispositions relatives à l’usage des vêtements personnels, au port de la barbe et des cheveux, etc.). Un projet d’arrêté d’Ernest Constans, alors ministre de l’Intérieur en 1890, renforça ses mesures en faveur des détenus politiques, notamment sur les dispenses du travail (art. 2) ou sur les autorisations et les conditions des visites (art. 3), etc. (voir BB/37/1, dossier 1, règlements applicables aux détenus politiques ainsi que BB/37/5, dossier Boniface, dans lequel est joint une transcription de l’art. 52 portant règlement du service et du régime des prisons de courtes peines affectées à l’emprisonnement).
Classés par circonscriptions pénitentiaires ou chronologiquement, les dossiers des détenus (individuels ou collectifs) forment la majeure partie de ce groupe documentaire (cartons 4 à 19), ils contiennent les notices de renseignements de ceux-ci, des extraits de jugements, des demandes d’encellulement, des décisions de mise en liberté ou des décisions de transfèrement, des listes des visites, une nombreuse correspondance ainsi que des coupures de journaux complètent ces dossiers parmi lesquels on signalera celle de l’affaire du Bonnet Rouge (Goldschild dit Goldsky, Marion et Landau, condamnés pour intelligences avec l’ennemi le 15 mai 1918, BB/37,9-10) ou encore ceux relatives aux grèves ou aux manifestations du 1er mai (BB/37/6, 7, 13, 16).
Si de nombreux documents ne permettent aucune étude de fond sur un sujet précis (notamment pour l’administration pénitentiaire pour laquelle les informations devront être complétées par celles conservées dans la série Y des Archives départementales), d’autres autorisent beaucoup d’espoir dans des domaines de la recherche spécialisée ou de recherches individuelles et ponctuelles portant sur une affaire précise. Ainsi les documents de l’affaire des Camelots du roi (BB/37/5) fourniront un apport non négligeable pour l’histoire du mouvement royaliste ou de l’extrême droite française (voir en particulier leurs dossiers individuels de détenus ainsi que les notes sur les conditions de leur détention). Issus des milieux lycéens et étudiants, les Camelots du roi sont une organisation de jeunesse française créée en 1908 et rattachée au mouvement monarchiste français de l’Action française (influencée par la doctrine maurrassienne). Ils sont dirigés, lors de leur création, par Maxime Real del Sarte, président de la Fédération nationale des Camelots du roi. En décembre 1908, ils chahutent violemment le cours d’Amédée Thalamas à la Sorbonne à qui ils reprochent d’avoir insulté Jeanne d’Arc. Leur action soulève cependant la désapprobation des milieux royalistes (voir les copies de la correspondance échangée par les Camelots détenus à la Santé, BB/37/5) et met en doute l’avenir de leur mouvement (voir la correspondance de Maxime Real del Sarte à sa mère, à la comtesse de Courville ou à Charles Maurras, BB/37/5). Enfin on notera l’intérêt des ces documents pour l’étude de l’antimilitarisme entre 1908 et 1910 ou des autonomistes alsaciens de 1927 à 1930.

Voir l’inventaire complet sur le site des Archives nationales

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